Adaptations des chats à un régime sans glucides.

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Du point de vue physiologique, les chats sont incontestablement adaptés à un régime sans  glucides.

Une faible attirance pour le goût sucré.

Les chats n’ont pas un penchant très marqué pour le goût sucré, à la différence de l’homme ou du chien. Cependant, une expérience rapportée par Desmond Morris dans son ouvrage Parlons Chat, tend à prouver qu’un chat affamé préfèrera du lait coupé avec de l’eau mais sucré, à ce même lait sans sucre. En fait, lorsque les molécules attractives pour le chat sont diluées, il appréciera alors volontiers le sucre. Ce goût peut aussi faire l’objet d’un apprentissage « contre nature ». Ainsi, j’ai pu remarqué que les chats habitués à ne manger que des croquettes mangeaient volontiers du pain !

Par ailleurs, il est à noter que les amidons ont la propriété d’avoir perdu leur goût sucré. Il pourrait alors être tentant de tromper les chats, au goût peu performant, surtout s’ils ne peuvent pas choisir leurs aliments. Mais à contrario, quand cette possibilité leur est offerte, ils sont capables de réguler et d’équilibrer leurs apports en macro-nutriments. Ainsi, une expérience consistant à alimenter des chats en self-service, a pu démontrer leur aptitude à choisir en fonction de leur goût. Sans surprise, ils délaissèrent instinctivement les glucides au profit des protéines. Respectivement 12 % des calories provenaient des glucides, contre 52 % pour les protéines (*).

Reste à savoir ce qu’il advient de ces glucides dans l’organisme, une fois ingurgités avec ou sans le consentement éclairé des chats.

Des enzymes peu gloutons à l’égard des glucides.

En premier lieu, pour découper ces longues chaines glucidiques, le chat ne peut pas compter sur les amylases salivaires, elles sont absentes dans cette espèce. La mastication ne contribue donc pas à amorcer la digestion des sucres. Pas mieux aux étages pancréatique et intestinal, où l’activité amylasique est réduite. Finalement, les sucres sont plutôt mal décomposés, et de nombreux petits fragments quitteront tel quels l’intestin grêle pour le côlon.

Pour diminuer ces pertes glucidiques et augmenter leur bonne absorption dans l’intestin grêle, les fabricants d’aliments soumettent ces amidons à une cuisson préalable. Ils amélioreront ainsi leur digestibilité. Dans ces conditions, rien ne s’oppose plus à cette overdose sucrée, qui se déverse dans le sang du chat sous forme de glucose. Que va en faire son organisme?

Le premier choix, le plus courant chez nous humains, est de le «brûler» au niveau cellulaire: c’est la glycolyse. Seulement les enzymes chargées de la tâche, les hexokinases et les glucokinases, sont rapidement saturées chez le chat.

Deuxième choix possible, le stocker dans le foie: c’est la glycogénèse, une option mise à profit par les sportifs humains pour améliorer leur endurance. Le glucose est alors repolymérisé en une autre chaine longue sucrée, appelée glycogène. Ce processus requiert de nouvelles enzymes, les glycogène-synthétases, peu actives chez le chat, plutôt enclin à la sieste qu’au sport le dimanche.

Troisième choix,  transformer le glucose et le stocker  sous forme de graisses dans le tissu adipeux. C’est la voie qui est privilégiée par le chat domestique, au détriment de sa silhouette.

Enfin, un détail qui intéressera les adeptes de la cuisine nouvelle pour chats. Une dernière enzyme normalement présente dans le foie est, elle, carrément manquante chez le chat, c’est la fructokinase. Ce qui l’empêche de métaboliser le fructose, le sucre contenu dans les fruits.

Le maillon faible du chat: son pancréas.

Mais en attendant, le chat doit faire face à un afflux de sucres inhabituel pour cette espèce. C’est là que le chef d’orchestre entre en scène, le pancréas. Il commence à mettre un peu d’ordre en libérant de grandes quantités d’insuline. Mais là encore, ses capacités sont très vite dépassées. Résultat: une hyperglycémie importante et prolongée, en comparaison à un humain ou un chien soumis à une orgie de sucre identique.

Les glucides contenus dans les croquettes pour chat sont la cause du diabète dans cette espèce.Un article récent démontre qu’un repas riche en graisses et en protéines, n’augmentait pas autant la glycémie postprandiale qu’un repas riche en glucides, même moins calorique. Il conclut sur la nécessité de réduire les glucides tant pour les chats sains que pour ceux présentant un risque de diabète. (**)

Mais les glucides, ce ne sont pas que les amidons. Ce sont aussi les fibres alimentaires, que l’on trouve dans les légumes. Sont-elles utiles ?

Les fibres: des glucides utiles?

Parfois oui. Ce sont des glucides « utilitaires », les « g.u. » de la méthode g.u.E.P.A.R.D.. Autrement dit, ce sont les « pompiers de service » qui interviennent pour sauver les causes désespérées. Ainsi, lorsqu’un chat a été « formaté » à consommer des glucides depuis son sevrage, ses intestins éprouvent un besoin addictif à leur égard. Et si on lui supprime les glucides du jour au lendemain, sans transition, on s’expose à des problèmes… allant de la simple diarrhée jusqu’à la colite aigüe, ou au contraire de la constipation. C’est là qu’interviennent les « g.u », les fibres alimentaires, appelées à la rescousse pour assurer la bonne logistique du bol fécal. Il y a deux types de fibres: solubles et insolubles.

Croquettes Fibre et Psyllium. L’adjonction modérée de fibres hydrosolubles améliore les chats sujets aux colites, lors de maladie inflammatoire chronique de l’intestin.Les fibres solubles, ou mucilages, se comportent comme une éponge. Elles peuvent retenir jusqu’à dix fois leur poids en eau. Elles forment alors un gel visqueux avec le chyme intestinal.  L’adjonction modérée de fibres hydrosolubles améliore les chats sujets aux colites, lors de maladie inflammatoire chronique de l’intestin. A plus forte dose, elles ont des effets positifs chez les paresseux du côlon et les chats sujets à constipation, notamment  consécutive aux boules de poils. Enfin, plus anecdotique, ces fibres ont un effet sur la satiété. En captant l’eau dans l’estomac, elles forment une gel « coupe-faim » utile chez les chats en surpoids.

Les fibres insolubles, ou cellulose,  piègent également l’eau  mais elles gonflent. Elles contribuent à l’émission de selles en gros volume, et de gros calibre ! En fait, ce n’est pas ce que le préposé au nettoyage de la litière apprécie le plus. C’est pourtant ce qui se produit avec une alimentation trop riche en fibres insolubles. Et que l’on retrouve majoritairement dans les légumes verts.

Légumes or not légumes ?

Les chats ne sont pas faits pour manger des légumes. Ces derniers s’avèrent d’ailleurs peu efficaces pour prévenir la constipation chez le chat. On peut toutefois s’interroger sur leur manie de mâchouiller de l’herbe ou les plantes d’intérieur. Certains suggèrent que c’est pour se faire vomir leurs fameuses boules de poils gênantes. D’autres avancent des hypothèses plus savantes. Pour ma part, je pense que c’est un comportement instinctif pour soulager leurs maux de ventre. Le symptôme d’un régime alimentaire inadapté.

L’ajout de légumes dans le régime d’un carnivore est une tendance anthropomorphique. Que cinq fruits et légumes puissent être bénéfiques aux humains, n’implique pas les mêmes effets pour un carnivore strict comme le chat. Au contraire, il est même possible que ces légumes en excès soient à l’origine de problèmes digestifs, en modifiant dès leur plus jeune âge le microbiote intestinal naturel du chat.

Les chats ne sont pas faits pour manger des légumes.
« Ça veut pas dire que j’aime les légumes ».

Références:

(*) Geometric analysis of macronutrient selection in the adult domestic cat, Felis catus. Journal of experimental Biology, 2011, 214 (6), 1039-1051.

(**) Effect of dietary carbohydrate, fat, and protein on postprandial glycemia and energy intake in cats.  J Vet Intern Med. 2013 Sep-Oct;27(5):1121-35